mardi 8 octobre 2013

Parce que j’ai vu « La vie d’Adèle » …


Ça c’est imposé à moi comme une évidence… Il fallait que je fasse un billet sur le film, sur Ce film… sur LE film « La vie d’Adèle ».

Déjà, même avant de voir le film, la « communicante » que je suis ne pouvait qu’être interpellée par le buzz autour du film. Le « bad buzz », même, pourrait-on dire… Il vous suffira de « googleliser » pour tomber sur les tonnes d’infos qui circulent sur le sujet.

Avant même la Palme d’or à Cannes, les techniciens qui révèlent les conditions de travail, puis l’interprétation des propos des 2 comédiennes principales… La « guerre » médiatique autour de ce film a envahi la toile, les journaux… Comment trouver l‘envie d’aller voir un film où le réalisateur est décrit comme un tyran ? Il est vite fait de se dire que, même si le film est grandiose, s’il a été réalisé dans de mauvaises conditions, pourquoi le cautionner en lui accordant 3 précieuses heures de notre vie ?

Mais, j’ai pour habitude de ne pas me laisser influencer par le regard des autres et, autant que possible, de me donner les moyens de me faire ma propre opinion.

Pictanovo, structure pour laquelle je travaille régulièrement, a coproduit ce film et j’ai donc été invitée à l’avant–première à Lille, vendredi dernier. Allais-je donc y aller ? Sans le savoir encore, j’ai réservé 2 places, au cas où…

Pour côtoyer Pictanovo, depuis plus de 15 ans, et avoir, du temps où je travaillais dans la production audiovisuelle, assisté aux comités de lecture de cette structure qui accorde, ou non, les aides à la production, je savais que souvent les aides accordées aux longs métrages sont la plupart du temps amplement justifiées.
Donc, si Pictanovo avait décidé de soutenir Abdellatif Kechiche, il y avait de grandes chances pour que, rien qu’à la lecture du scénario, ce film soit prometteur. (Découvrez ici l'itw de Vincent Leclerq DG de Pictanovo après la Palme d'Or)

Pour ma part, de ce réalisateur je n’avais vu que « L’Esquive » tardivement, en dvd, et j’avais passé un moment interpellant, et apprécié ce cinéma « vérité ».

Avec mes 2 places réservées, j’ai alors proposé à des ami(e)s de m’accompagner et là, personne n’était disponible, et, plus, certains m’ont confié ne pas vouloir y aller à cause de tout ce qui s’était dit sur le film…
Mais j’aime pas aller toute seule au cinéma, moi ! Alors j’ai regardé la bande annonce...


et j’ai eu envie d’en découvrir plus. 

Le « hasard » a fait que finalement une de mes amies avait réservé aussi… Youpi, nous allions partager ce moment !

« La vie d’Adèle »… Alors Oui ! Nous sommes DANS la vie d’Adèle pendant 3 heures, totalement immergés, un peu voyeurs même, parfois. Adèle, en plan serré quasiment tout le film, remplit l’écran et nous fait vivre toutes ses émotions.

Les scènes de sexe… sont longues, ou plutôt durent aussi longtemps que dans la vraie vie.
Je l’avoue, je me suis demandée pourquoi, quand elle fait l’amour avec son petit ami au début, on est «obligé» de constater que le sexe de son partenaire est en érection.
Et pourquoi la première scène d’amour entre les 2 femmes (qui dure 7 minutes, mais ça je l’ai su après) vous impose de regarder 2 êtres faisant l’amour et jouissant sans cesse comme si vous étiez dans la pièce avec elles. J’ai entendu des personnes quitter la salle à ce moment-là, et, au fur et à mesure de la scène, les gens riaient, mal à l’aise, je présume.

Après, il est vrai que, sans être experte en relation homosexuelle féminine, j’ai eu l’impression (et les lesbiennes qui sont intervenues sur le sujet l’ont confirmé) que la chorégraphie de ces ébats amoureux s’apparente davantage à un fantasme masculin qui visualise 2 femmes en train de faire l’amour qu’à des images fidèles à la réalité. Mais pourquoi penser à tout cela en les regardant ?... Parce qu’on n’a tellement pas l’habitude de voir des scènes de sexe aussi longues au cinéma, et encore moins entre 2 femmes, parce que j’ai pensé à toutes mes amies comédiennes qui m’ont confié combien cela pouvait être difficile d’être ainsi, nue devant toute une équipe technique (mais à priori en entendant Adèle Excarchopoulos, sur France Inter, elle a trouvé ça fun), parce qu’il est difficile de regarder 2 personnes faire l’amour aussi longtemps, si l’on n’a pas des tendances voyeuristes, sans forcer son cerveau à analyser la situation pour sortir de l’émotionnel …

Mais, tout comme ce réalisateur nous montre que, comme dans la vraie vie, ses personnages mangent parfois la bouche ouverte, il nous montre que lorsqu’ils prennent une douche ils se nettoient vraiment, même entre les fesses…

Et je me suis dit, quand la lumière s’est rallumée que ces moments là n’étaient pas indispensables… Mais 4 jours après, je me dis que non, ils ne sont pas « indispensables », mais ils sont un choix artistique, un choix qui nous permet vraiment de rentrer dans la vie d’Adèle, d’y croire, tant aucun détail ne nous échappe… Et oui, dans la vraie vie les gens font l’amour plus de 2 minutes…

Il y a les scènes de sexe, ok,  mais il y a tout le reste, où les acteurs ont un jeu criant de vérité, où l’on rit, où l’on est au bord des larmes, où l’on est mal à l’aise… Comme eux.

Les 2 comédiennes affichent une complicité rarement perçue au cinéma. Léa Seydoux est tout à fait crédible dans ce rôle de lesbienne un peu masculine, artiste peintre (allant jusqu’à prendre des cours de dessin). Ce film a été préparé quasiment sportivement par les comédiens… Mais par dessus tout… Adèle Exarchopoulos, qui crève l’écran pendant 3 heures, est juste… J’ai pas de mot… Excellente, incroyable, monumentale… Je devinais ce que son personnage pensait juste par ce que je voyais dans son regard… C’était juste saisissant… troublant…

Alors, le film a sans doute été éprouvant, je n’en doute pas… Parfois difficile pour les comédiens et les techniciens… Cependant, ne pas aller le voir parce que vous n’avez pas envie de cautionner les méthodes de travail de ce réalisateur (et c’est votre droit) vous privera de voir un des films qui comptera, je pense, dans l’histoire du cinéma et peut-être même de notre société… Cela vous privera aussi de découvrir le talent d’Adèle Exarchopoulos. Et aller le voir, ce sera aussi soutenir toutes les personnes qui ont contribué à ce film, et pour que, s’ils ont souffert à le faire, ce ne soit pas en vain.

Et vous le verrez (j’espère), ce film nous parle aussi tout simplement, d’amour, de passion, d’homophobie, de préjugés, de la difficulté de s’accepter tel que l’on est et de croire en soi, même si notre entourage nous imaginait autrement que ce que nous sommes…

J’aime ce personnage qui veut « juste » être institutrice au milieu de cette bande d’artistes-intellos, parce que, pour elle, le plus important c’est que les jeunes apprennent à  lire et à découvrir la littérature. J’aime la mise en évidence subtile, dans leur couple, d’une qui accepte l’autre telle qu’elle est, sans condition, alors que l’autre la pousse à « se réaliser » dans quelque chose qu’elle n’a pas besoin de faire, juste pour qu’elle soit «artiste» à son tour…

C’est un film qui nous parle de la vie, la vraie… Et « Adèle » est avec moi depuis vendredi, son authenticité et sa sincérité m’accompagnent au quotidien, au point que je pense que nous avons sans doute tous une part « d’Adèle » en nous,… Vous savez c’est l’endroit où l’on ne triche pas avec soi-même.
Alors pour être certaine de pouvoir la retrouver quand cela sera nécessaire, je vais, de ce pas, enrichir ma bibliothèque avec « Le bleu est une couleur chaude » de Julie Maroh qui a inspiré le film. 

Et j'espère, que vous soyez plutôt Sartre ou Bob Marley, que ce film vous touchera de manière positive, comme il l’a fait pour moi. 


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