Comment réagiriez-vous si votre
héritage était équivalent à 1 million d’euros de dettes et que vous étiez le
fils de Françoise Sagan ?
Françoise Sagan est décédée en
2004, laissant derrière elle une quarantaine d’ouvrages mais aussi bon nombre de
créances, dont le créancier principal, l’état, pour 60% de la dette.
Denis Westhoff, son fils, a mûri
sa réflexion durant 3 ans avant d’accepter son héritage. Comment prendre une
telle décision quand vous savez que l’échelonnement du paiement de cette dette
durera entre 30 et 40 ans, alors que vous approcher vous-même de la
cinquantaine ?
Outre Sa vérité sur la vie de sa
mère, et de son père, le fils de Françoise et de Bob, nous raconte aussi dans son ouvrage, «Sagan et
fils», comment il s’est battu pendant plus de 3 ans pour réunir les
informations nécessaires, rencontrer les bons interlocuteurs, trouver des
compromis pour lui permettre non seulement d’honorer les dettes de sa mère mais
aussi et surtout sauver le patrimoine, culturel, que celle-ci avait produit
durant toute son existence.
L’idée que Denis Westhoff ne
pouvait pas supporter était celle que les éditeurs des œuvres de Françoise
Sagan, et donc détenteurs des droits d’édition, pour la plupart n’honoraient
plus leurs « contrats » en ne rééditant pas régulièrement ces
ouvrages, et que cela avait comme conséquences de faire disparaître son œuvre,
d’empêcher les lecteurs de découvrir ou de re-découvrir « La Sagan »,
mais aussi de ne pas permettre de générer de nouvelles ventes et donc de créer
du revenu pour rembourser la dette…
Il en parle ici sur Europe 1 et ici dans un itw paru sur Têtu, au sujet de son combat pour la réédition des œuvres de sa mère en 2010.
Il en parle ici sur Europe 1 et ici dans un itw paru sur Têtu, au sujet de son combat pour la réédition des œuvres de sa mère en 2010.
Même si au fond de lui, ce fils
d’une femme totalement « hors norme » au destin exceptionnel, a
toujours su qu’il accepterait cet héritage, car il savait que c’était Sa
mission… Grâce à ses conseillers, il a relevé ce défi en le concevant comme la
création d’une entreprise, étudiant les rentrées et les sorties possibles, avec
toutes les difficultés que peut avoir le fait de reprendre seul une entreprise
avec 1 million d’euros de dettes !
J’ai été touchée par le récit de
Denis Westhoff, la façon dont il partage avec le lecteur sa réalité, son choix
motivé avant tout par la sauvegarde du patrimoine culturel que représente
l’œuvre de sa mère, non pas pour s’enrichir loin de là, mais pour laver son
honneur à elle et surtout faire en sorte que dans des générations, en France et
ailleurs dans le monde, on puisse encore découvrir, aimer ou ne pas aimer un
livre de Françoise Sagan.
Le titre que ce fils à donner à
son livre, « Sagan et Fils » m’a sauté aux yeux, après la lecture de
celui-ci. Il m’a fait pensé à toutes ces enseignes que l’on voit souvent sur
les devantures des boutiques des artisans bouchers, plombiers, boulangers… de
tous ces métiers-passions qui se transmettent de père (souvent) en fils pour
faire perdurer tout le savoir-faire que les anciens leur ont transmis.
« Sagan et fils » me dit tout cela, comme si parce qu’il accepté son héritage ce fils
pouvait désormais le transmettre, continuer à le faire vivre.
Pour moi Denis
Westhoff ne s'est pas arrêté à ce qu'il voyait : 1 million d'euros de dettes ! Il a posé
un autre regard sur la situation, il a su en percevoir, malgré la montagne de
difficultés et de combats que cela allait représenter, tout le potentiel qu'il
y avait à se battre pour défendre ses convictions et sa mission : que l'œuvre
de sa mère ne disparaisse pas et que ce potentiel : créatif, culturel et
financier ne meurt pas avec elle. Si il s'était arrêté à ce que lui renvoyaient
la situation et les personnes qui l'entouraient, il aurait refusé l'héritage.
C'est sans doute parce qu'au delà de son héritage Denis Westhoff défend l'accès à la culture pour tous, qu'il en a eu la force :
C'est sans doute parce qu'au delà de son héritage Denis Westhoff défend l'accès à la culture pour tous, qu'il en a eu la force :
"Ce que je veux défendre, c'est l'idée
relativement simple qu'une vieille dame qui habite Limoges ou Montélimar puisse
trouver LA CHAMADE chez son libraire, et ce sans avoir à dépenser trente
euros".
Et comme je suis une des initiatrices du
Cercle de Réflexions BEEZ&CO, Le Business sous un autre regard,
cela va de soi que l’action de Denis Westhoff est, à mon avis, une façon de
voir "Le business sous un autre regard", de ne pas oublier que notre action dans la société doit
contribuer à l'amélioration de celle-ci, de gagner notre vie avec nos business,
certes, mais on n'oubliant pas de créer de la valeur...
Vous l’aurez compris, je vous
conseille vivement la lecture de cet ouvrage !
Si vous ne l’avez pas déjà vu, le
film « Sagan » de Diane Kurys (2008), où Sylvie Testud y interprète Sagan de
façon bluffante, est très instructif aussi pour découvrir, et même comprendre
la vie de cette femme ultra moderne pour son époque, et qui a, c’est certain,
grandement contribué au changement du statut des femmes dans notre société.
Et pour nous rappeler à quel
point cette femme était sans doute aussi polie et tolérante que nous le
rapporte ces proches, l’interview décalée (certes très connue) que Pierre
Desproges lui a fait « subir ».
Et si vous avez encore un peu de temps ;)... à écouter : l’émission L'humeur vagabonde sur France Inter, consacrée à Denis Westhoff et Françoise Sagan.
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